Benjamin GLUSSOT, gérant du fonds, fait le point sur Portzamparc Opportunités ISR.
Retranscription audio
Portzamparc Opportunités ISR poursuit sa transformation
Portzamparc Opportunités ISR est un fonds qui permet de vous exposer aux actions européennes de toutes capitalisations. Depuis 2021, l’ajout de la dénomination ISR signifie que le fonds est devenu un fonds ISR au sens de la catégorie 1 de l’AMF et de l’article 8 SFDR.
Ceci implique que la gestion ESG devient un élément central du processus de gestion et que le fonds superforme largement son univers de référence sur les critères extra financiers.
Nous privilégions une allocation concentrée sur une sélection de 30 à 40 entreprises avec un biais sur les grandes capitalisations. La capitalisation médiane actuelle est de 21 Mds € et la capitalisation moyenne est de 57 Mds €.
Le processus de gestion repose sur 3 piliers fondamentaux. Nous utilisons une approche quantitative basée sur le momentum des cours de bourse et les apports de la finance comportementale. Notre objectif est de mieux appréhender les dynamiques de long terme qui animent les marchés financiers afin d’adapter la structure de nos portefeuilles en fonction de leurs évolutions. En parallèle, nous réalisons une analyse financière et extra financière des entreprises, ce qui implique des rencontres régulières avec les dirigeants d’entreprises.
De la volatilité à tous les étages
Dans la continuité de l’année 2021, l’inflation demeure l’un des principaux catalyseurs des marchés financiers.
Le renforcement des anticipations inflationnistes amène les différentes banques centrales à adapter leur politique monétaire plus rapidement qu’escompté. Ainsi, depuis le début de l’année les discours des institutions se sont clairement durcis. Le programme d’achat d’obligations de la BCE devrait s’interrompre dans le courant de l’année et la porte est désormais ouverte pour une éventuelle hausse des taux au quatrième trimestre en fonction de l’évolution des données.
La tonalité est la même de l’autre côté de l’Atlantique. Comme souvent, l’économie américaine est en avance et a acté une hausse de taux de 25 points de base en mars. Dans le même temps, les prévisions de croissance ont été ramenées de 4% à 2,8% alors que les perspectives d’inflation ont été révisées à la hausse.
Ainsi, on comprend aisément le défi majeur des banques centrale : briser les tendances inflationnistes sans affecter la croissance.
L’invasion de l’Ukraine par la Russie fin février est le second élément majeur qui a façonné les tendances de marchés. En effet, au-delà de l’augmentation de la prime de risque globale, les conséquences des sanctions économiques pèseront probablement durablement sur le cours des matières premières et agricoles. Les entreprises devront donc composer avec de nouvelles contraintes sur les chaînes d’approvisionnement au moment où la résurgence de la pandémie de Covid 19 implique de nouveaux confinements notamment en Chine.
Des performances boursières qui ne sont pas nécessairement le reflet des performances opérationnelles.
Cet environnement inflationniste a donc favorisé une nette remontée des taux et pour la première fois depuis très longtemps le marché doit composer avec des intérêts réels positifs.
Ce changement d’importance est à l’origine de la violente rotation sectorielle qui a commencé dès le début d’année et a animé une grande partie du trimestre écoulé. La principale difficulté résulte dans le fait que l’évolution des cours n’est plus nécessairement le reflet des performances opérationnelles. Prenons l’exemple du luxe :
Les publications des résultats annuels ont mis en évidence la poursuite d’une forte croissance organiques (42% chez Hermès malgré un dernier trimestre pénalisé par des contraintes de production et 27% chez LVMH en grande partie grâce aux activités Mode et Maroquinerie, les mieux margées).
Des prévisions de croissances pour 2021 qui certes se normalisent mais demeurent supérieures à 10% et des hausses de prix déjà fixées.
Malgré l’excellence de ces résultats, le marché s’est focalisé sur les niveaux de valorisations records difficilement conciliables avec un environnement de remontée des taux. Ainsi, notre exposition aux valeurs du luxe nous a coûté plus de 2% de performance sur le trimestre.
Le même constat est valable pour ASML Holding. L’un des premiers équipementiers de l’industrie des semi-conducteurs a publié un carnet de commande record reflet de la demande structurelle du marché. Là encore, cela s’est révélé insuffisant pour le marché et le titre baisse de 13,68% sur le trimestre.
Au final, les mêmes causes ont provoqué les mêmes effets sur l’ensemble des valeurs de croissance et ce quel que soit leur secteur d’activité (équipement médical, bien de consommation, technologie). La contre- performance de ces investissements qui ont largement contribué à la performance du fonds en 2020 et 2021 ont impacté de plus de 3% la performance relative et font plus qu’expliquer notre retard de 2,75% à la fin du trimestre sur notre indice de référence l’Euro Stoxx NR.
A l’inverse, les sanctions prises à l’encontre de la Russie en répercussion de l’invasion de l’Ukraine ont favorisé l’émergence de nouvelles tendances. En effet, ces sanctions touchent principalement les exportations des matières premières produites en Russie notamment les énergies fossiles, les métaux et les matières premières agricoles.
Ainsi, Norsk Hydro a profité de forte hausse des cours de l’allumium puisque la Russie est le second producteur. Cependant l’entreprise a bénéficié de ses choix stratégiques opérés depuis quelques années. En effet, lors des opérations de cession de certaines activités, le groupe norvégien a choisi de conserver certaines unités de production d’électricité afin de subvenir aux besoins de ces infrastructures assez énergivores. Ainsi, Norsk- Hydro est l’un des rares groupes relativement épargnés par la hausse des coûts de l’énergie lui permettant de maintenir sa rentabilité et explique en grande partie que ce cas d’investissement nous apporte près de 1% de performance.
Acter les changements de tendances de marchés
Vous l’avez compris le contexte inflationniste et géo- politique ont profondément changé la physionomie des marchés. Les choix opérés par les investisseurs peuvent à ce stade ne pas sembler refléter la qualité des fondamentaux de certaines entreprises. Pour autant, ce mouvement nous a semblé suffisamment important et durable pour aller plus loin dans l’adaptation de nos portefeuilles à cette nouvelle donne, conformément à notre process d’investissement.
La plupart de nos opérations d’allègement et de ventes ont concerné des valeurs de croissance et des secteurs à forte valorisation. Nous avons poursuivi nos allègements sur le luxe et nous ne sommes désormais plus surpondérés sur le secteur. De la même manière, nos allègements sur ASML Holding ou la vente de Reply nous amènent à être sous pondérés sur le secteur technologique.
Vous l’aurez compris, nos derniers choix d’investissement ont privilégié les tendances qui ont émergé ces dernières semaines:
L’achat de Linde : un des principaux producteurs de gaz industriels nous permet de nous exposer à un groupe dont la plupart des contrats comporte des clauses d’indexation à la hausse des prix du gaz. Ainsi, les marges sont largement préservées et ce sont les clients qui supporteront l’essentiel de l’inflation. De plus, de par son expérience et son positionnement dans l’ingénierie, Linde nous semble un groupe incontournable dans la mise en œuvre de l’accélération de la transition énergétique afin de réduire la dépendance de l’Europe
OCI N.V est un fabriquant de fertilisants et de produits chimiques industriels. Les sanctions économiques réduisent l’offre de matières agricoles et d’engrais ce qui favorise le groupe. Par ailleurs OCI est un producteur de bio-méthanol, carburant qui peut se substituer au fuel lourd utilisé par les transporteurs maritimes qui doivent accélérer la réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre en raison du durcissement de la réglementation. Enfin, l’ammoniaque produit par le groupe peut être utilisé dans la liquéfaction de l’hydrogène et ainsi favoriser son transport. Ainsi, OCI N.V nous semble pouvoir jouer un rôle clé sur 3 thématiques clés des prochaines années
Edenred est connu pour son activité de services aux entreprises, notamment les tickets restaurants. C’est surtout l’une des rares entreprises qui bénéficie de l’inflation et de la remontée des taux. En effet, le volume d’émissions des tickets restaurant mais aussi des tickets Carburant sont corrélés à l’inflation. De plus, son business model implique que le groupe reçoit les paiements des entreprises avant l’émission des titres de paiement. Le groupe possède donc une trésorerie excédentaire de court terme que la remontée des taux permet de mieux rémunérer et donc d’augmenter ses produits financiers. Enfin, dans le cadre de la pérennisation des mesures de télétravail, le groupe a signé de nouveaux contrats qui devraient permettre d’accélérer la croissance organique dès 2022.
Comme vous l’avez donc compris, le pragmatisme l’a emporté dans la conduite de nos portefeuilles au cours de ce 1er trimestre. Les fondamentaux des entreprises de croissance demeurent excellents mais le changement d’environnement notamment inflationniste nous semble influencer le comportement des investisseurs. Ce message a été suffisamment important pour ne pas être ignoré.
Nous continuerons par conséquent d’être particulièrement vigilants quant aux conséquences économiques du conflit en Ukraine sur une éventuellement poursuite du resserrement des conditions économiques.
Les performances passées ne préjugent pas des performances futures et ne sont pas un indicateur fiable des performances dans le temps. Propos recueillis le 31/01/2022